Bénin: PRD: Les leçons d’une marche historique

11 décembre 2014

Bénin: PRD: Les leçons d’une marche historique

En ce 10 décembre 2014, veille du vingt quatrième anniversaire de la Constitution du 11 décembre 1990, une lave incandescente barrait la bonne vieille ville de Porto-Novo comme une balafre de défi : le peuple en fusion, réclamait ses élections. Trente mille manifestants ou plus selon les organisateurs. On n’avait plus vu cela depuis plus de vingt cinq ans ; c’était au paroxysme de la contestation du pouvoir militaro-marxiste, quand « les masses » n’en finissaient plus d’avoir faim. S’extirpant de la crémation annoncée dans laquelle l’avait fourré la bienpensance cotonoise, le PRD inflige, urbi et orbi, à la surprise de tous, la réalité de sa puissance et de son influence inoxydables. Récit d’une manifestation dionysiaque et de ses conséquences.

C’était comme si subitement, une jungle avait recouvert la ville. Une jungle humaine. Porto-Novo est appelé à un réveil forcé ; à une rupture de monotonie dont elle se souviendra. De Ouando et d’Adjarra –Dokodji à Catchi ; de la Place du Gouvernement à la Préfecture, les foules montent. Ce sont toutes les parties d’un tout qui fusionnent dans un tourbillon sulfureux. Les pancartes se dressent : les manifestants veulent qu’enfin leurs élections se tiennent et que cette fameuse LEPI, véritable Arlésienne de la vie politique nationale, deviennent une réalité. La foule dénonce le régime d’imposture et le totalitarisme graduel qui s’est installé, devenant l’air du temps. Elle réclame bruyamment des élections locales, communales, municipales et législatives. C’était une foule aux couleurs du PRD mais qui unissait les citoyens de toutes les origines et de toutes les conditions : les sans –grades, les sans –voix, voire les sans-avenirs. C’était une houle multicolore et railleuse, pacifique et déterminée qu’encadrait une maréchaussée inquiète et goguenarde. Voici que la liberté s’exerce, prise de force par cette incomparable multitude qui n’aspire qu’à se faire entendre et dont l’on n’est bien obligé de respecter la sidérante mobilisation.
Dans la foule, quelques notables dont l’on aurait tort de minimiser la présence : Eric Houndété par exemple, qui estampille chacune de ses actions et de ses présences du sceau de la liberté et de la fierté démocratique. Il est là, et cela n’est pas forcément anodin…

Foule océane

Mais, laissons là ces notables et revenons à cette foule océane, emmitouflée dans un charivari respectueux, rythmant son tumulte et maintenant sa retenue. Aucun débordement : tel a été la consigne que respecte à la lettre cette foule immense. Devant la Préfecture, le Secrétaire Général du PRD sort sa motion et la lit : il en ressort que le pays veut ses élections et que le PRD qui vient de démontrer dans un style magistral qu’il existe encore et pour longtemps, jouera sa partition de la façon la plus ferme pour les lui obtenir. A bon entendeur ? Derrière ses volets, il est là, le Préfet de la Ville, transfuge du PRD et qui sait interpréter ce qui se passe sous ses yeux : le yayisme n’était qu’un feu follet qui s’estompe déjà, et le PRD demeure la force essentielle. De son côté, le maire, Moukaram Océni a lui aussi largement entendu le message : cette foule là est venue lui rappeler que son temps est terminé et qu’il faudra passer le témoin à quelqu’un d’autre et qu’aucune contingence ne viendra modifier cette échéance immarcescible. Les errements qui l’emmenèrent à commettre les mêmes égarements que son prédécesseur, et à se complaire dans de coupables marivaudages avec le pouvoir en place, le condamnent d’emblée au même destin : celui de l’impitoyable oubli.
Mais que retenir de cette grand messe qui vit des milliers de béninois, pour la plupart du PRD, battre le macadam de Porto-Novo ? Deux choses essentielles : que le PRD est au jour d’aujourd’hui, la seule et première force d’opposition homogène au Bénin ; il a affiché les forces et les vertus d’un véritable parti national et est resté constant dans sa posture oppositionnelle. Ensuite, que le PRD reste l’unique faiseur de roi sur l’échiquier politique national et a donc par conséquent vocation à gagner tôt ou tard, l’exercice du pouvoir d’état.
Le jeu des hypothèses
Pour 2016, deux options lui sont possibles : désigner un candidat en son sein pour une présidentielle de tous les possibles, ou soutenir un candidat externe qui serait proche de ses valeurs et se porterait garant de ses intérêts.
La première hypothèse serait mal pensée : aucune personnalité du PRD n’a ni le charisme, ni la culture ni la popularité d’un Adrien Houngbedji ; au sein du parti il lui serait déjà difficile de faire l’unanimité donc d’avoir la moindre petite chance de la faire au niveau électoral. Il reste que d’aller trouver ailleurs la perle rare, comporte aussi le risque d’une démobilisation au sein des militants et donc d’un début de divisions. La deuxième hypothèse est celle du possible : trouver le candidat qui a l’avantage de la jeunesse, et dont le charisme et l’intelligence rivalisent sympathiquement avec ceux de Maître Adrien Houngbedji, figure charismatique et historique du mouvement. Un candidat dont la constance en opposition au pouvoir de Boni Yayi ne pourrait être contestée ; un candidat qui en termes de vertus, affiche l’exemplarité la moins discutée. Enfin un candidat qui retournerait en dividendes politiques, le soutien électoral que lui auront apporté le PRD et son chef. Sans anicroche…
En mobilisant aussi fort, le 10 décembre dernier, Adrien Houngbedji sait qu’il s’est donné d’office le choix des armes, aussi bien à l’interne qu’à l’externe, et qu’aucune intelligence intéressée par ce qui pourrait devenir un deal, ne saurait lui marchander une alliance d’une telle nature.
Est-ce de la fiction déraisonnable que de penser que ce candidat est Eric Houndeté et que maître Adrien Houngbdédji ne serait pas tout à fait mécontent d’un tel avatar ? A l’avenir d’en décider ! Il ne reste que peu de temps ; mais l’apothéose du 10 décembre 2014 ouvre une page mémorable dans l’histoire.
La figure inlassable de Maître Adrien Houngbédji se profile ; et ses mains assurées continuent d’écrire pour demain, les lettres capitales de son parti et de son pays. Adrien tel qu’en lui-même…

 

Adrien Houngbedji, le maître inoxydable d'un jeu prenant...
Adrien Houngbedji, le maître inoxydable d’un jeu prenant…
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Commentaires

Theophane
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Notre constitution a plutôt 24 ans!!!!